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Les génies dans la mythologie basque

La mythologie basque se dinstingue des mythologies indo-européennes en ce sens qu'ils ne croient que ce qu'ils voient et pas du tout en des êtres "surnaturels" qui vivraient dans les cieux, comme des dieux classiques. Pour eux, la terre est la deesse mère (Amalur) qui a deux filles: la lune et le soleil. Mari vit sous terre et est la deesse de tous les basques. Lorsqu'elle s'accouple avec Sugaar (connu aussi sous le nom de Sugoi, prononcer shouguoï) par exemple, elle provoque des tremblements de terre. Les basques pensent qu'elle a eu un orgasme un peu violent et que c'est cela qui provoque ces tempêtes, tremblements de terre etc. Ce n'est surtout pas une punition d'un ou des dieux quelconques comme on se l'explique dans d'autres croyances. Ils existe énormément de génies, chacun spécialisés dans une action, bonne ou mauvaise. En voici quelques uns ci-dessous.

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Ubendua (morsure ou la marque d'un mauvais génie). Prononciation: oubéndoua
Il s'agit d'une morsure ou marque qu'un mauvais génie laisse sur le corps d'une personne. Il opère de nuit alors que ses victimes dorment. Pour se prémunir contre de tels agissements, on dit qu'il faut placer dans la chambre un missel ouvert à la page correspondant au début de l'Évangile selon Saint Jean.


Ubelteso (divinité de la région d'Oiartzun). Prononciation: oubéndoua
Une légende très connue dans la région, raconte qu'une certaine française passait à cheval par ces lieux, elle s'arrêta à la chapelle et vola le rosaire pendant des mains de la Vierge. Elle s'éloignait avec sa monture lorsqu'une personne lui apparut lui intimant l'ordre de rendre ce qu'elle avait volé. Elle répondit en niant le fait et se parjurant elle dit:
"Arribiyur !" que je me convertisse en pierre si ce que je dis n'est pas la vérité.
Dieu la punit, comme elle était il la pétrifia. Voir Sakre.


Ur (eau). Prononciation: our
L'eau est un élément auquel est associé bien des croyances, des légendes et des souvenirs d'êtres mythiques. La pluie, dans certains cas la neige, marque l'annonce de la venue du Christ (légende de Kortezubi) Quand elle coïncide avec la mort de quelqu'un la pluie est l'annonce de la félicité, du salut. La pluie de mai est bénéfique pour celui qui la reçoit sur la tête. Celle de la Saint Pierre annonce une bonne année de châtaignes.
On croit également que de nuit les eaux extérieures sont sous l'emprise des génies maléfiques (Gaizkiñak) ou des malins. La pluie de la Saint Jean possède une vertu particulière, il en va de même pour l'eau recueillie la dernière nuit de l'année quand commence l'année nouvelle: elle assure la santé pour l'année qui vient. Dans certains villages, les enfants la portent dans les maisons en chantant ceci:
"Ur goiena, ur barrena, urte berri egun ona; etxte onetan, sar dedilla pakearekin ondasuna, onarekin asasuna; gure baratzan belar ona; Jaungoikoak digula egun ona".
"eau d'en haut, eau d'en bas, année nouvelle, bonjour; que dans cette maison entre la richesse avec la paix; la santé avec les biens; dans notre jardin de la bonne herbe; que Dieu nous donne une bonne journée".
"agua de en cumbre, agua abajo, nuevo año, de buenos días; que en esta casa entre la riqueza con la paz; la salud con los bienes; en nuestro jardín de la buena hierba; que Dios nos da un buen día".

Autrefois (c'est encore le cas dans bien des endroits) on accrochait tous les ans des croix de laurier aux limites des villages et on bénissait les terres en les aspergeant d'eau bénite. A titre d'exemple, cette coutume se pratique à Ataun depuis 1535, date la plus ancienne où elle est attestée.


Urgerldi (puits). Prononciation: ourguéldi
Les eaux de mer, celles de plusieurs étendues d'eau de divers puits et nappes associées aux rivières, sont considérées comme étant les demeures de génies, les Lamiñak. Ce sont des lieux où sont englouties d'anciennes maisons ainsi que des agglomérations maudites.
Dans la région de Gernika/Guernica, on parle de Traganarru, génie des pluies torrentielles. Dans des temps anciens, il a épouvanté les gens de la mer.
Les lagunes sont réputées être ces lieux d'où proviennent de lourdes nuées charriant les bourrasques. Le génie de la tempête (Mari, Odei) les guide afin de décharger la grêle sur les villages. La lagune de Zaizedo et le trou d'eau d'Urbion sur la hauteur du même nom ont acquis une solide réputation dans les villages de la Rioja.


Urre (or). Prononciation: our
D'après des croyances populaires, ils sont nombreux ces endroits où de l'or est enterré. On signale ainsi plusieurs montagnes, des cavernes, des vieux monuments, des maisons, des hauteurs rocheuses.

Les montagnes:
- A Maruelexa (église des Maru), endroit situé sur les hauteurs d'Arrolamendi, près de Nabarniz (Biscaye/Bizkaia), un trésor y est enterré. Le matin de la Saint Jean, lorsqu'on voit poindre le soleil à l'horizon, un chaudron sort de terre au point précis où se trouve le précieux dépot.
- A Igozmendi près d'Aulestia (Biscaye/Bizkaia), il y a une caisse d'or.
- Sur le Goikogane (Arrankudiaga) à Udalatx, il y a également une caisse d'or à l'endoit où les rayons du soleil tombent droits à midi.
- Sur le mont Ereñasarre sur le territoire de Kortezubi (Biscaye/Bizkaia) est enterré un idinarru (peau de boeuf), remplie d'or.
- Dans l'Urbasa de l'or si peu enfoui que les brebis peuvent le mettre à jour rien qu'en passant avec leurs sabots.

Les cavernes:
- Un voleur laissa ses trésors dans une grotte du mont Itzine à Orozko (Biscaye/Bizkaia) appelée Atxulaur. Etant mort au loin, personne ne put pénétrer dans l'antre gardé par un taureau de feu.
- Dans les cavernes de Mairuelegoreta il y aussi de l'or enterré. Les paysans des environs y firent de vastes fouilles afin de l'extraire mais sans succès.
- Dans une grotte d'Oiartzun (Guipuscoa/Gipuzkoa) aussi de l'or enterré mais à l'entrée on entend le chant du coq de la maison Berdabio.

Les maisons:
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La dame de Lekuberri, une maison de Zugarramurdi (Navarre/Nafarroa) ramenait de la grotte des Lamiñak, à côté de chez elle, une quenouille et un fuseau en or en guise de cadeau fait pour les services qu'elle avait rendu. Les Lamiñak lui posèrent comme condition de ne jamais se retourner en chemin mais lorsqu'elle mit un pied dans sa maison elle regarda derrière elle. A l'instant, les précieux objets disparurent de ses mains.
- Il arriva une chose similaire à la dame de Ioanea à Ituren (Navarre/Nafarroa) qui ramenait une carde en or de la caverne d'Aizpuru.


Urteberri (Nouvel an). Prononciation: ourtébérri
C'est ainsi que l'on désigne le premier jour de l'année dans divers villages du Pays Basque. Dans des endroits, après les douze coups de minuit, lorsque débute l'année, on recueille à la fontaine les toutes premières eaux. On croit que recueillie à ce moment là, l'eau possède des vertus extraordinaires. C'est pour cela qu'à Lekaroz, dans la vallée du Baztan (Navarre/Nafarroa), les enfants la répartissent dans les maisons. Dans d'autres villages il en va de même si l'on en juge par les chansons de quête de ce jour là. Ainsi, à Elizondo (Navarre/Nafarroa) on chante ceci:
"Urte berri, berri, zer dakarrakazu berri ? uraren gaña, bakia ta osasuna, urtes, urtes !".
"Année nouvelle, nouvelle, qu'apportes-tu de neuf ? la fleur de l'eau, la paix et la santé, urtes, urtes !".

On croit que le tronc, Gabonzuzi, qui se consumme dans plusieurs foyers la nuit de Noël ou la dernière nuit de l'année, a également des vertus surnaturelles. C'est au même type de croyance que répond par exemple le fait de placer le tronc, le premier de l'an, sur le seuil de la porte principale de la maison. On y fait passer par dessus les animaux domestiques.
Il est possible que dans le fond de ces pratiques populaires gisent des mythes solaires, ainsi que d'autres liés à la terre mère d'où jaillissent les eaux, symbole d'abondance.


Urtezahar (vieille année). Prononciation: ourtéssahar
Dans plusieurs contrées du Pays Basque, c'est par ce nom que l'on désigne le dernier jour de l'année.
Les feux jouent un rôle important dans les pratiques populaires relatives à cette dernière nuit. Il en va de même pour celles de Noël et de la Saint Jean. A Gazeo et à Onraita (Alava/Araba) par exemple, après le repas on fait une flambée entre plusieurs familles. On y grille des châtaignes que l'on mange ensuite. Entre temps, les jeunes garçons mettent le feu à de vieilles outres et les accrochent à la pointe d'un bâton. Ils courent ainsi en criant:
"Erre pui erre"".
"Brûle lui le cul à la vieille année".

Cette nuit, à Olaeta (Alava/Araba), on allume dans la cheminée, un tronc de hêtre. Avec lui, on finit de brûler complètement le tronc de la dernière nuit de l'année précédente. Après le repas on l'amène à l'étable et on l'y laisse, afin d'éloigner les maladies du bétail. Le tronc possède des vertus spéciales dès l'instant où il a brûlé la nuit de Noël ou la dernière nuit de l'année.
C'est avec ce feu qu'à Oiartzun (Guipuscoa/Gipuzkoa) on prépare le repas du soir de la nuit de Noël.


Source: José Miguel Barandiarán, Dictionnaire Illustré de Mythologie Basque
traduit et annoté par Michel Duvert, Donostia, éditions Elkar, 1994. ISBN: 2-913156-36-3

 

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