La mythologie basque se dinstingue des mythologies indo-européennes en ce sens qu'ils ne croient que ce qu'ils voient et pas du tout en des êtres "surnaturels" qui vivraient dans les cieux, comme des dieux classiques. Pour eux, la terre est la deesse mère (Amalur) qui a deux filles: la lune et le soleil. Mari vit sous terre et est la deesse de tous les basques. Lorsqu'elle s'accouple avec Sugaar (connu aussi sous le nom de Sugoi, prononcer shouguoï) par exemple, elle provoque des tremblements de terre. Les basques pensent qu'elle a eu un orgasme un peu violent et que c'est cela qui provoque ces tempêtes, tremblements de terre etc. Ce n'est surtout pas une punition d'un ou des dieux quelconques comme on se l'explique dans d'autres croyances. Ils existe énormément de génies, chacun spécialisés dans une action, bonne ou mauvaise. En voici quelques uns ci-dessous.
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Odei, Odai, Odeiaixe, Ortz, Urtz, Ortzi, Ostri, Urtzi, Ortzilanoa (génie de la tempête, tonnerre). Prononciation: odéï, odaï, orts, ourts, ortsi, ostri, ourtsi, ortsilanoa
D'autres appellent ainsi le gros nuage de tempête ou plus simplement l'agent du tonnerre, celui qui tonne.
Quand on entend tonner on dit: Odeiak jo (celui qui tonne a frappé).
Quand on entend tonner fortement: Odei asarrea (le tonnerre en colère).
Quand on voit d'épaisses nuées: Odeia dator (le nuage de tempête arrive).
Le tonnant, arrive: Odei dago (il y a de la tempête dans l'air).
Dans ces expressions qui sont en vigueur dans le milieu rural, les principales significations du mot Odei apparaissent clairement comme le tonnerre et génie de la tempête ou encore du nuage orageux.
A Gesalibar/Arrasate (Gipuzkoa/Guipuzcoa) on appelle Odeiaixe (vent d'Odei) ou (vent du tonnant), un vent d'Est qui amène les bourrasques. On dit aussi qu'Odeiaixe peut passer sans décharger de pluie ou de grêle, tant que le vent du Nord ne se met pas en travers de sa route. En revanche, si, quand la tempête se forme, le vent du Nord arrive avec sa batterie de nuages en les faisant courir sur les flancs d'Urdalatx, la rencontre des deux vents provoque une forte tempête de pluie ou de grêle. Cette dernière est encore plus violente si un troisième vent, Naparraixe, intervient en surgissant du coté de Muru, montagne qui est au S.E. de Gesalibar.
On essaye de maîtriser Odei grâce à des procédés magiques, ou bien on a recours à Dieu afin qu'il ne s'abatte pas de fléau causé par ce terrible élément (voir Aidegaxto).
Ogi (pain). Prononciation: ogui
Dans le Pays Basque le pain est en rapport avec divers mythes, ainsi celui de la femme qui fut remerciée par un cadeau, suite a l'assistance qu'elle apporte comme le fait toute bonne voisine. On retrouve très souvent ce genre de cadeaux de pain blanc donné par les Lamiñak. Dans certaines circonstances, on a considéré que le pain avait des vertus mystiques. Parfois il a été entouré d'attentions spéciales, supersticieuses ou religieuses. Plus généralement, on connait le dialogue entre les pains de blé et de maïs:
"Ezta garia bezelako belarrik"
"Il n'y a pas d'herbe comme le blé" dit le pain de blé.
"Ni naizan lekuan ez da goserik"
"on ne connait pas la faim là où je suis" répondit la méture.
En principe on cuit les pains de blé, de maïs et de seigle dans les fours. Cependant les galettes de maïs (taloak en général et pastetx, pastetch en Soule) sont grillées dans la cheminée avec un gril en fer de forme spécifique. Parfois, ces galettes sont fourrées au fromage. Elles portent alors le nom de marukuku (maroukoukou).
De même on fait des petits pains avec de la pâte à pain de farine, on les cuit dans la braise, sous la cendre. De la même façon on cuit les pains sous les braises du foyer, dans des sortes de petites casseroles fermées avec un couvercle métallique.
Les lundi et samedi sont des jours réputés les plus propices pour faire le pain. Le jour de la Sainte Agathe, nulle part on ne fait de pain ou de lessive.
On attribue au pain du mendiant la faculté de faciliter le parler des enfants attardés dans ce domaine. Le pain fait l'objet de plusieurs pratiques. Ainsi on a pris l'habitude d'embrasser le pain que l'on va donner à un mendiant. On ne doit pas laisser un couteau planté dans le pain, on ne doit pas poser le pain à l'envers car ceci cause de la peine aux âmes des défunts, on doit ramasser à la main le pain tombé par terre sans l'aide d'aucun instrument, l'embrasser ou le montrer au feu de la cheminée et le manger.
Oiarzun (écho) a ne pas confondre avec le village Oiartzun. Prononciation: oïarssoune
Il est une sorte de réponse de la montagne à nos appels, à nos voix, c'est que l'on dit dans certains villages. A Berastegi (Gipuzkoa/Guipuzcoa) on dit que c'est le Basajaun qui fait cette réponse. A Olaeta (Araba/Alava) c'est la réponse de Mari d'Anboto.
Oilar, Ollaar (coq). Prononciation: oïlar, oliaar
Il n'est pas rare de rencontrer le coq dans les légendes basques. Son chant annonce la fuite des génies comme les lamiñak (voir la légende du pont de Licq). Parfois l'esprit malin (Gaiskiñe ) revêt l'aspect de cet animal. Si quelqu'un souffre d'une maladie mystérieuse il faut examiner les plumes de son oreiller ou du traversin. Si on trouve un amas qui épouse la forme d'un coq entier, on considère que la maladie est incurable. Si la tête n'est pas formée, il faut porter les plumes à une croisée de chemins et les y brûler: alors la maladie sera guéri.
Ola (forge). Prononciation: ola
Cette pratique est une longue tradition en Pays Basque, son importance économique et sociale a fortement marqué ce peuple. Elles étaient de deux types:
Aizeola (forge à vent) ou Jentilola (forge des Jentil)
Urola (forge hydrolique).
Aizeola c'est la forge de montagne, implantée prés d'un bois ou d'une mine, très souvent dans les montagnes à haute altitude. Ce type de forge a persisté jusque vers le XIVème siècle. On y faisait du fer fondu que l'on appelait arrabio.
C'est pour utiliser la force motrice des rivières que les anciens basques durent construire leurs forges dans le bas pays, prés des rivières. On les appelle urola et qui succéda aux premiers, aizeola. On y fabriquait du fer pâteux que l'on appelle agoa et dont on extrait la scorie (zepa) à coup de marteau.
Olentzero, Olentzaro, Orentzaro, Omentzaro, Orantzaro. Prononciation: oléntséro, oléntsaro
Au XVIIème siècle on désignait par Onenzaro la nuit de Noël. Olentzaro est une époque de l'année. Cependant dans certains villages on présente ce même Olentzaro sous les traits d'un personnage un peu grotesque, il fait son apparition la nuit de Noël. Il est généralement présenté comme un charbonnier, sale, grossier, il a autant d'yeux que l'année a de jours plus un, il apparaît avec un bouquet d'ajoncs, une faucille à la main. On dit qu'il est glouton, que pendant la nuit de Noël il entre dans la maison par la cheminée, c'est pour cela qu'il faut nettoyer le conduit à l'avance (comme le Père Noël actuel ?), il vient dans la cuisine quand la famille s'est retirée au lit, il se chauffe aux flammes d'Olentzero enbor (tronc d'Olentzero) qui se consumme cette nuit-là dans la cheminée. Parfois, comme à Berastegi, il met le feu à sa botte d'ajoncs et s'est ainsi qu'il se chauffe.
On représente Olentzero sous la forme d'un mannequin fait de paille et de chiffons, on le promène sur des brancards, de maison en maison, en faisant la quête de la nuit de Noël. Les enfants le font de jour, les adultes, de nuit. Cette tradition semblait se perdre ou, du moins, réduite à quelques villages mais elle revient en force de jours, y compris dans la partie française du Pays Basque.
Cependant, la principale raison de voir ce charbonnier descendre dans les villages basques vient d'une légende qui dit que ce personnage vient annoncer la naissance de Kixmi (Jésus). Ce fut aussi la disparition subite des Jentil.
Oneztarri, ozminarri, oxmearri, ozpinarri, tximixtarri, ozkar, oñaztar, inhar (pierre de foudre). Prononciation: onéstarri
Le nom même traduit bien cette croyance qui veut que la foudre soit une pierre lancée depuis la nuée orageuse. Dans certains endroits on dit que c'est un éclat de silex. Dans d'autres, une hache en pierre polie (hache préhistorique ?). Enfin, pour terminer, on dit aussi que c'est une hache de bronze ou d'acier.
Selon un mythe, la foudre est une pierre particulière qui, lorsqu'elle tombe sur terre, s'y introduit jusqu'à une profondeur de sept stades. Ensuite elle remonte progressivement année par année pour, finalement, affleurer le sol au bout de sept ans. A partir de ce moment elle possède le pouvoir de protéger des mauvais esprits la maison auprès de laquelle elle se trouve. Ces derniers ou Aidegaxto, représente la foudre elle même ou l'être surnaturel qui lui est associé. Ce mythe est en relation avec le thème indoeuropéen du marteau de Thor et avec celui des flèches de Jupiter.
Le génie jeteur de foudre est Aidegaxto, comme Mari ou Odei, il revêt une forme de nuage orageux. On tente de l'apaiser ou de le dominer à l'aide de procédés naturels, magiques ou religieux.
Ainsi, pour éviter que la foudre ne tombe sur une maison, dans certains endroits on a pour habitude de poser sur le seuil de la porte principale une hache dont le fil est dirigé vers le haut, ou bien une faucille à la pointe d'un bâton planté à l'entrée de cette maison. On met aussi aux portes des propriétés des fleurs de chardon, des branches de frêne et d'aubépine, ou bien des croix de laurier et de saule, bénies le jour des Rameaux. Des branches d'aubépine et de noisetier sont également placées aux fenêtres des maisons. On met des croix de cire aux portes et aux fenêtres. On sort une croix sur la fenêtre et on brûle des chandelles bénies. On brûle des herbes bénies, des feuilles de laurier, des fleurs de la Saint Jean. On jette par le fenêtre de l'eau bénite et du sel. On sonne les cloches de l'église. On met sur sa tête ou dans une poche, de l'aubépine ou des piquants de cette plante ainsi que des feuilles de laurier etc.
Oñaztura (foudre). Prononciation: oniastoura
Quand l'aubépine est bénite, la foudre ne tombe pas sur elle. Lorsqu'on entend tonner, on prends une branche d'aubépine à la main pour se protéger contre la foudre. Cette pratique est très répandue.
La bougie de cire qui a brûlée pendant les offices à l'église lors de la Semaine Sainte, ou bien celle que l'on bénit pour la chandeleur, on la fait brûler durant les bourrasques pour que la foudre ne s'abatte sur la maison. On a également pour habitude de verser quelques gouttes de cette cire dans le béret des hommes et dans quelques bijoux des femmes en guise de protection individuelle contre la foudre. On retrouve ce type de rite dans certaines régions avec les animaux domestiques. De même, afin d'éloigner la foudre on verse quelques gouttes de cire dans divers lieux de la maison et on pose sur la porte principale des croix faites également de cire.
Opari (offrande). Prononciation: opari
Il y a des offrandes qui, si elles ont un sens chrétien pour certains, semblent avoir répondu dès leur origine à d'autres conceptions. C'est le cas par exemple des offrandes que l'on dépose parfois sur des sépultures, sur l'autel, dans les plateaux des églises, dans le foyer, sur les fenêtres, aux limites des propriétés etc. pour obtenir le succès de nos entreprises, pour notre santé, celle de nos parents, de notre bétail, pour apaiser les âmes des défunts, pour s'attirer les faveurs de Dieu, des saints, de nos amis, de la communauté, pour un groupe, un parti etc. Tout ceci a un sens dans la mesure où il existe un ordre pouvant transcender l'ordre naturel qui préside dans ce monde.
L'offrande consiste parfois dans le sacrifice d'un animal. Tel est le cas du chat qu'on enterre vivant dans certains endroits pour obtenir la disparition d'une épidémie causant la mort de plusieurs d'entre eux. On fait de même pour un poussin quand une maladie dangereuse se propage parmi la volaille. Pour obtenir la guérison d'une personne malade on avait recours parfois au sacrifice d'un animal, ainsi à Licq (Soule/Xiberoa/Zuberoa) où, par exemple, on écorchait une brebis.
Des fois l'offrande prend l'aspect d'une libation. C'est le cas des agriculteurs souletins qui, au moment de se retirer des propriétés où ils viennent de travailler, versent l'excédent de leur récipient d'eau utilisée pendant la journée. Alors qu'ils répandent cette eau sur le sol, ils récitent un Pater pour le repos des âmes de leurs défunts. De même ils jettent par la porte de la maison, un peu d'eau ramenée de la fontaine et destinée à la consommation familiale.
Orrazi (peigne). Prononciation: orrassi
C'est l'un des objets qui apparait le plus fréquemment dans les mythes et légendes du Pays Basque, de même dans ceux et celles des pays voisins. Mari, belle femme de Murumendi, se peignait à l'entrée de son antre lorsqu'elle fut aperçue par l'héritier de la maison Burugoena (Beasain).
La Lamiña de la caverne Kobaundi (Arrasate) était à l'entrée de sa demeure, elle se peignait. Un jeune homme de la maison Korrione passait par là et en tomba amoureux.
On peut citer ainsi plein de cas où l'on voit une très belle femme qui se coiffe avec un peigne en or ses longs cheveux dorés, eux aussi.
Ostadar, Ortzadar, ortzeder, ostil, ostilika, ostroi, intzirka, uztargi, zubiadar, erromako zubi, itxasoadar, jainkoaren gerriko (ceinture de Dieu) (arc en ciel). Prononciation: ortsadar
L'élément ost ou ortz entre dans la composition de plusieurs de ces mots. Il figure également dans de nombreux noms tels ostegun et ortzegun (jeudi), ostiral (vendredi), oskarbi (ciel bleu), ostarte (clarté entre nuages), oskorri (aurore), ortzi (tonerre, firmament) etc.
Parmi les croyances relatives à l'arc en ciel, certaines veulent que cet arc soit tendu entre deux rivières, qu'il boive et conduise l'eau aux nuages, qu'il fasse changer de sexe celui qui passe dessous, que des esprits célestes y circulent. Son symbole est l'herbe appelée uztaibelar (herbe de l'arc en ciel) (rumex crispus) : on s'en sert de talisman pour conjurer les tourmentes.
Ostebi (pluie céleste). Prononciation: ostébi
On attribue les pluies bénéfiques de printemps à la divinité céleste Ost ou Ortzi. On croit ainsi que la pluie de mai fait pousser les cheveux et à cette occasion, beaucoup de personnes sortaient tête nue. Cette coutume était assez répandue en Pays Basque. La pluie de mai favorise les personnes et les choses, c'est ce qui se dit dans la région de Sare/Sara (Labourd/Lapurdi).
(génie nocturne). Prononciation: mirokoutana
Ce génie de la mythologie basque a l'aspect du chien, d'après des récits d'Oiartzun (Navarre).
Oiulari (crieur). Prononciation: oioulari
Il existe des êtres surnaturels manifestant leur présence par de forts cris ou par des hénissements. Un Basajaun vivait à Mogulegorreta (sierra de Gorbea) il poussa un "cri" (oihu). Une jeune fille qui fauchait la fougère dans cette montagne, lui répondit "hihihi". Le Basajaun l'enleva et l'amena à sa caverne.
Au lieu dit Kobatxoitturi (Ataun), les gens de la maison Artzate étaient en train de charger le four à chaux de combustible avec l'aide des voisins. Le four étant déjà rempli de pierres. Une nuit, alors qu'ils étaient en plein travail, ils entendirent un hénnissement provenant des hauteurs d'Iruzuloeta (dans la sierra d'Olatzaitz où les Jentil vivaient). L'un des travailleurs répondit:
"au lieu de pousser des cris tu ferais mieux de descendre nous aider" alors le Jentil d'Iruzuloeta lança un énorme rocher qui tomba justement sur le four et l'écrasa. Le rocher y est encore et le four inutilisable.
Un génie laissa ainsi son empreinte sur la porte d'une cabane de Laumugarrixeta, en expédiant une gifle à un paysan qui avait osé lui répondre et qui courait s'y réfugier. On sait que la maison est sacrée. Elle est placée sous la protection de Dieu et des âmes des ancêtres. Celui qui s'y réfugie jouit du droit d'asile. Toute personne, y compris les génies, qui en poursuit une autre, ne doit pas franchir le seuil de la porte pour s'en emparer.
Des femmes s'en retournaient chez elles de nuit après avoir filé dans la maison Batix à Larrazabal. Elles entendirent un irrintzi (ce fameux cri basque qui ressemble à un hénissement et qui sert aux bergers pour communiquer entres-eux dans les montagnes) et elles répondirent de la même façon. Mais quand elles entendirent un autre bien plus proche, elles eurent peur et s'échappèrent en courant vers une maison. Au moment de fermer la porte, ce qui arrivait en lançant du feu la frappa et laissa la marque de dix digts. Cette maison s'appelle Urkiza aurrekua.
Enfin, un homme de Licq/Ligi (Soule/Xiberoa/Zuberoa) se rendait au port de Larrau/Larraine. La nuit le surprit en chemin. Il poussa comme un hénissement. Du bois, il entendit une réponse. Il continua et en poussa un autre. On lui répondit du même endroit que précédemment. Arrivé à la cabane d'Ibarrondo, il en poussa un troisième. Lorsqu'il entra, il demanda aux autres bergers:
"Qui m'a répondu ?"
"ce n'était pas nous" répondirent-ils. C'était le Basajaun. Si jamais nous l'avions fait, c'est lui qui serait venu ici".
Source: José Miguel Barandiarán, Dictionnaire Illustré de Mythologie Basque
traduit et annoté par Michel Duvert, Donostia, éditions Elkar, 1994. ISBN: 2-913156-36-3
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